• Euro-obligations : les quatre impasses qu'ignore Hollande

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    Euro-obligations : les quatre impasses qu'ignore Hollande.

    Alors que la crise de la zone euro est plus que jamais d'actualité, François Hollande tente de convaincre son homologue allemande, Angela Merkel, sur la nécéssité d'introduire des euro-obligations. Un point de vue que Laurent Pinsolle, notre blogueur associé, ne partage pas du tout. Il explique, en quatre points, pourquoi elles présentent un danger.

     

    L’OCDE vient d’apporter son soutien aux euro-obligations, le mot magique dont la seule évocation devrait mettre fin à la crise de la zone euro. Pourtant, une étude rapide de ce dispositif en démontre très rapidement les limites, insurmontables, mais aussi le dessein caché.

     

    L’irresponsabilité institutionnalisée

    Il est en partie paradoxal que les euros béats s’accrochent autant à cette proposition. En effet, ils sont les premiers à dénoncer les comportements irresponsables qu’a permis le passage à la monnaie unique, avec la baisse des taux d’intérêt (oubliant au passage la responsabilité des créanciers ), permettant à des pays comme la Grèce de trop s’endetter. Or le mécanisme des euro-obligations va beaucoup plus loin dans l’irresponsabilité.

     

    En effet, les euro-obligations consistent à emprunter en commun, ce qui revient à demander aux créanciers les plus sérieux de donner une caution à ceux qui sont le plus en difficulté. Mais du coup, cela donnerait une prime aux comportements les moins vertueux. En fait, c’est pour cela que les euros béats y sont favorables car cela pousserait à adopter en parallèle des dispositifs de contrôle extrêmement stricts pour en limiter les effets pervers.

     

    Solidarité avec les créanciers

    Alors, bien sûr, pour vendre les euro-obligations, on évoque la solidarité entre les pays européens, en sous-entendant que Berlin serait égoïste, contrairement à Paris. Mais il faut dire que nos dirigeants n’ont pas montré une grande responsabilité dans la gestion des deniers publics et que cela ne leur pose pas beaucoup de problèmes d’être solidaire avec l’argent des Allemands… Et puis, quelle est cette solidarité dont on nous rabâche les oreilles ?

     

    Comme pour les plans européens, on nous vend une solidarité avec les peuples. Avec un taux de chômage de plus de 20% en Espagne ou en Grèce, cela semble juste. Sauf que tous ces dispositifs européens sont, en réalité, des mécanismes de solidarité avec les créanciers de ces pays, pas leurs citoyens. En effet, les euro-obligations permettent de garantir le paiement des créances des pays en difficulté. Les peuples n’en voient pas la couleur.

     

    Pire, ces mécanismes introduisent un immense aléa moral pour les milieux financiers puisqu’ils arrivent à obtenir à la fois des taux d’intérêts très élevés sur les dettes espagnoles et italiennes mais souhaiteraient en garantir le remboursement, pour avoir le beurre et l’argent du beurre. Pourtant, si les taux sont élevés, c’est justement parce qu’il y a un risque de défaut partiel, qu’il faudrait leur laisser assumer pour être véritablement juste.

     

    Un dispositif dysfonctionnel

    Mais les euro-obligations ne posent pas qu’un problème d’aléa moral. L’étude des mécanismes proposés permet de sérieusement contester tout simplement le fait qu’elles résoudraient les problèmes. J’avais étudié le fonctionnement du système proposé par l’institut Bruegel il y a deux ans (collectivisation de la dette à hauteur de 60% du PIB de chaque Etat en « bons bleus » et maintien des dettes nationales au-delà, en « bons rouges »).

     

    Il n’y a pas besoin d’être un financier hors pair pour comprendre qu’il serait sans doute beaucoup plus difficile de placer les « bons rouges » des pays actuellement en difficulté. Qui voudrait prêter à l’Italie sa deuxième tranche de 60% de dette publique, sachant que la première serait prioritaire et qu’elle serait la seule à la garantir ? Il est bien évident que la spéculation serait encore plus forte que sur les bons du Trésor italiens actuellement indifférenciés…

     

    Un mécanisme invendable

    Devant les limites d’un tel système, certains avaient imaginé faire le contraire, conserver des dettes nationales jusqu’à 60% du PIB et ne collectiviser que la partie supérieure aux 60%. Mais ce dispositif semble politiquement totalement invendable. Comment demander à l’Allemagne de donner sa caution solidaire sur un tas de créances pourries, sachant qu’elle refuse déjà mordicus le dispositif proposé par l’institut Bruegel, comme elle vient de le rappeler.

     

    Et il faut un peu se mettre à la place de l’Allemagne pour comprendre l’énormité de ce qui lui est demandé. En effet, mettre en place des bons du Trésor communs à hauteur de 60% du PIB, cela revient à créer environ 5600 milliards d’euros de dettes communes (dont environ 1600 milliards de dettes allemandes). En clair, cela revient à demander à l’Allemagne une caution solidaire de 4000 milliards d’euros sur les dettes des autres pays.

     

    Passons sur le fait que les socialistes Français ne voient aucun problème à donner une telle caution, un nouveau signe de leur irresponsabilité. Mais il semble aujourd’hui totalement illusoire d’espérer que Berlin l’accepte étant donné l’état du débat public en Allemagne. Les euro-obligations, c’est, potentiellement, vingt fois le Mécanisme européen de solidarité ! Il n’y a aucune chance que nos voisins l’acceptent et voilà pourquoi cela bloque depuis deux ans.

     

    Bref, non seulement les euro-obligations sont, à raison, invendables, mais en plus, elles ne résoudraient pas la crise. En fait, ce nouveau machin sorti du cerveau malade des eurocrates, est seulement le moyen de pousser l’agenda d’une Europe fédérale.

    Laurent Pinsolle

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